13/452 au PPD Chaudfontaine: Jour 3 et fin

Bruxelles, 6 août 2012 (date de publication du post)

L’étoile rouge associée à ce post, était-elle nécessaire? Il est difficile de répondre à cette question sans exprimer ce que représente pour moi ce symbole. L’étoile rouge, c’est la perf. mais qu’est ce-qu’une perf.? Un résultat à 4 chiffres au moins? Il suffit de min-cash dans un EPT pour l’obtenir. Une table finale? Ce n’est pas le cas ici à mon grand regret. Battre 97% du field? Nous l’avons fait ici, mais dans ce cas, et sans vouloir faire de la prétention, le blog serait inondé d’étoiles rouges. Combien de fois n’ai-je pas sauté dans le percentile 99. Une semaine, je l’ai fait en ligne trois fois sur des fields de plus de 1000 joueurs? Mais une dixième place, même une septième, est toujours une grosse déception. Ce n’est pas une perf. Ca ne rapporte rien relativement aux toutes premières places! Et c’est ça le poker de tournoi… le plus frustrant des pokers. Ici, j’ai eu envie de mettre l’étoile rouge pour deux raisons. La première est que j’ai le sentiment d’avoir joué mon meilleur poker. Il y a eu des erreurs et je les connais, je les classe (dixit Starensen), j’en tire un enseignement. Mais pour le reste, j’étais dans le bain! La seconde, c’est le compte rendu. Je m’y suis attardé méticuleusement, à tel point, qu’un mois et demi et 5 posts plus tard, je suis enfin en train de le terminer.

Après avoir dormi moyennement, discutant une bonne partie de la nuit avec Miguel Silva, Charles Herman et Yannick Bourdain, j’apperçois les 4 tables du Day 3. Lorsque je m’assieds, avec mes 648k, je constate rapidement un problème deux sièges à ma gauche. Je ne connais pas ce joueur, mais je l’avais repéré à l’arrivée à Chaudfontaine deux jours plus tôt. A nouveau, comme dans le post précédent, c’est une attitude. Il vaut mieux l’avoir à sa droite qu’à sa gauche. Son tapis avoisinant 1.8 million conforte ma pensée. Ce gars est un très bon joueur. J’apprends rapidement qu’il est Scandinave, plus précisément Suédois. J’ai le sentiment d’avoir tiré la plus mauvaise place des 34 places qui se proposaient. Je ressens la même chose qu’à Vienne au Day 3. C’est la même place dans deux villes différentes. Je n’ai jamais vu ce gars, mais je connais son style de jeu. Ca va 3-bet light très souvent. Je ne vais pas pouvoir faire de bon vols rentables souvent.

Après quelques mains, je suis au hijack et je trouve . Le joueur en question est au bouton, mais j’ai déjà la quasi certitude qu’il va 3-bet mon ouverture. Mon plan pourrait être de 4-bet shove d’office. Mais je n’aime pas cette idée. Les blinds sont 10k-20k. J’en ai 32. Je sais qu’il ne me connait pas, mais peut-être a-t-il repéré que j’avais repéré qu’il allait souvent 3-bet light. Je trouve qu’un call face à un 3-bet, suivi d’une agression en check-raise shove sur beaucoup de flops intéressants pour moi est meilleur qu’un 4-bet, car le 4-bet peut-être interprété comme light et payé par un éventail large de mains par ce gros tapis. Comme ma main a de l’équité pour voir un flop, j’aime bien le call sur son éventuel 3-bet. Je peux alors envisager de check-raise sur un flop que j’ai rencontré vaguement avec un valet ou un roi, ou un flop qui donne un tirage couleur ou quinte ouverte à ma main. J’open à 45k, et comme prévu il me relance à 115k. Vous me direz que si c’était si prévisible, le 4-bet est indiqué, mais je trouve la seconde option plus rentable. Je n’ai pas forcément envie de sauter maintenant avec une main qui n’a pas déjà rencontré un flop qui lui convient. Je call les 70k manquants. Flop: . Je check. Il s’apprête à faire le Cbet. Là, je fais un contre-tell représentant de la force. Je ne dirai absolument pas sur ce blog quel est ce tell, mais lorsqu’il touche ses jetons, je le fais, et il se ravise pour checker. Je pense vraiment que ça a joué. Turn: . Je donk 135k et il passe. Cette brique sur le turn n’est bien sûr pas ma carte gagnante à ses yeux et je le sais, mais cette ligne lui fait forcément penser que je faisais un check-raise au flop et que je ne peux plus lui laisser voir des cartes gratuitement avec mon gros flop, surtout qu’un tirage couleur commence à s’ouvrir. S’il avait fait son Cbet, j’aurais été emmerdé, je le reconnais. Je pensais à un K, un J, un tirage ouvert ou couleur, mais pas un tirage ventral. J’aurais sans doute abandonné le coup face à un Cbet. Mais malgré un éventuel abandon au flop, le call de son 3-bet lui aura fait comprendre que je ne passerais pas si facilement contre ses sur-relances, c’était de la pacifisation.

Finalement, je grinde bien à cette table pas vraiment facile et mon tapis monte au million. Mais je fais une erreur stupide, dont je me mords les doigts encore une demi-heure après. Un gars est venu s’asseoir à ma gauche. En l’observant j’ai repéré qu’il était très ABC, très lisible et peu créatif. Il parle à quelqu’un et j’entends qu’il n’est pas très dangereux. Mais j’oublie ce détail qui me sera coûteux. Sur 12k-24k, un gars ouvre à 51k à ma droite. Je call avec et plus d’un million devant moi. Le gars à ma gauche call aussi les 51k. Flop: . L’ouvreur ne fait pas le Cbet. J’en profite pour reprendre la main à 83k, car le joueur à ma gauche n’a pas souvent un As selon moi. Mais il me paye. Je sais que je ne représente pas non plus un As, à moins d’un As suited, et c’est ce que je pense qu’il croit. L’ouvreur préflop passe et nous sommes deux. Turn: . Je le mets trop rarement sur un 3 pour ne pas faire un second barell. Et je mise 145k. Avec cette mise, il ne peut plus penser que je n’ai pas l’As ou mieux. Mais il me paye. C’est à ce moment que je comprends que le coup est fini pour moi. Le mec a un As. River: . Je check, il fait une mise qui ressemble au value bet le plus classique qu’on puisse faire avec un As et je passe. Et je m’en veux, je m’en veux, je m’en veux. Là où je m’en veux, c’est d’avoir osé imaginer un instant qu’au flop, le type m’avait float, alors que ce mot est forcément inconnu ou peu connu de son vocabulaire pokeristique. J’ai simplement oublié le profil du joueur en faisant mon deuxième barell. Je lui dis: “petit As suited”, et il me dit sincèrement : “As-Dame”. Ce chapitre vous explique comment perdre 145k bêtement.

Je retourne au million, et suis déplacé à une autre table. Deux heures plus tôt, j’avais pensé soudoyer Frédéric Bertholet pour qu’il me déplace. Je voulais lui offrir 5 ou 10% de mes futurs gains, tellement la place était mauvaise avec ce Suédois deux sièges à gauche. Il lui aurait suffit d’attendre que je sois BB et d’équilibrer les tables. Cette corruption n’aura pas été nécessaire :). De toute façon, il n’aurait pas accepté.
Tel un sauveur, tel un prince, le voilà qui arrive pour me déplacer. J’arrive à la table où se trouve Mathieu Jamar, avec qui j’ai sympathisé la veille. Après une ou deux heures, nous sommes en demi-finales, il reste deux tables. Mathieu a ouvert UTG et je l’ai 3-bet du bouton, sans doute ma 3e grosse erreur du tournoi. Il m’a insta 4-bet shove et j’ai passé. J’avais , et il m’a avoué quelques jours plus tard avoir fait ça avec . Il avait montré un au moment du coup. J’ai perdu 225k dans ce coup et j’ai regretté de l’avoir relancé car je m’attendais à cette issue. Mais à 15 left, c’était difficile de payer avec mes septs contre un open-raise UTG. J’avais pensé au call pour set miner au départ. Car sur 20k-40k, et face à son ouverture à 100k, mon million me permettait de set miner. J’aime opter pour l’action la plus agressive. Dans ce cas-ci c’était une erreur.

Plus tard, avec 660k au tapis, sur des blinds 25k-50k, antes 5k, j’open shove avec depuis le milieu de parole. Un gars se trouve en BB. J’en ai parlé dans l’un des post, il s’appelle David. Il joue depuis un an et a quelques lacunes. Son tapis est de 360k et il a posté la blind de 50k. Il décide de payer avec . C’est assez comique car, moi qui était devenu assez tight depuis deux ou trois tours, juste arrivé en zone push-fold et sur mon premier all-in, comment pourrais-je avoir une poubelle. Ma range contient forcément une pocket honnête ou un bel As, range contre laquelle A-6 n’est pas très glorieux, jouant sans doute son tournoi a 30% maximum dans un pot qui fera au total 360(son tapis)+360(mon tapis qui le couvre)+25(SB)+50(antes)=805k. Dans ce cas-là, il vaut mieux abandonner sa blind je trouve. C’est le même 70-30 qu’à Vienne, et un vient bouffer 60% de mon tapis au flop.

Avec 300k, j’attends une nouvelle main pour pousser, mais je ne reçois que des poubelles, obligé de laisser les blinds passer de tout leur poids sur moi, et ce durant une orbite. C’est lorsque j’ai 185k, grignoté par les blinds et les antes, que je trouve . Je pousse, suis payé par le bouton et un autre. Flop: . Check du gars dans les blinds, barell du bouton, call du gars dans les blinds. Turn: . Check, énorme mise du bouton, et finalement call du gars dans les blinds qui a l’air non capable d’abandonner ses coeurs. River: . Check et check behind. Le bouton montre . L’autre joueur dit que c’est la rivière qui fait gagner AA pour le side pot. En fait, il a un peu honte d’avoir payé ses coeurs si cher, il est presque déstacké. Mais avec deux pairs, comment aurait-il pu ne pas shove le flop ou le turn. C’est drôle, il raconte une histoire à dormir debout mais soit. Je retourne mes neufs et jontheriver is back in the business. Je suis à 650k.

La résurrection sera brève. UTG ouvre à 125k sur 25k-50k. C’est payé par un gars en middle. Je trouve et envoie mes 650k. UTG reshove et le payeur passe. UTG montre . Board: et tout s’arrête sur cette rivière. Je saute 13e avec un goût amer en demi-finale, tout comme dans mon précédent deepstack 5 mois plus tôt, les MegaPokerSeries de Vienne. En partant, je me dis que Starensen va gagner, il est de loin favori pour moi. J’ai bien envie de trouver un bookmaker pour faire mon pari, mais il est trop tard et je rentre à Bruxelles pour faire ma session du dimanche en ligne. Starensen gagne le tournoi comme prévu et ma série de posts est enfin finie… Yessssssssss!

Merci pour votre patience, en ce qui concerne ce final à Chaudfontaine